Je suis dans une nuit
profonde de hasbeenness.
pas moderne pour un
sou, au sens contemporain du terme de l'art comptant pour pas grand chose/
Je n'écris pas "chatte",
pas "queue", pas « érotique » pas « sensuel », je ne pipe mot sur aucunes bouches
qui s'embouchent dans le cœur de la nuit ou sur un banc public, je nuis grave
à la modernité.
L'heure est déjà
passée, l'heure n'est plus qu'aux jeux de mots, qu'aux jeux de vilains. Demain.
Tant de mots à notre
disposition et si peu de sens commun. Tant de mots qui n'ouvrent que des
tiroirs grouillants de vers, QUOI ! de vers quelle nuit des temps interminable
on se dirige. Il est urgent que l'heure sonne, que l'heure de l'homme problème s'apocalypse un bon coup. Dans le
chaos de l'homme KO le poème ne se relève qu'à grand peine, il chancelle dans
la nuit pleine d'étincelles.
Le boxeur sue son
poème de sang à grands gargouillis par le nez et la bouche.
Je compte jusqu'à 10
1 / 2 / 3
Je ne vois qu'un grand
corps malade agonisant où l'homme poème mange ses enfants ; il recrache au loin
les petits os des phalanges et ça fera plus tard des feux follets, dans le
cimetière des dictionnaires. Toutes les alarmes hurlent en même temps, l'homme poème
arrive à grands renforts de feu, d'échelles et de lances,
mais au lieu d'éteindre
l'incendie, il brûle la nuit, des enfants naissent et c'est reparti.
4 / 5 / 6
Je me tiens au-dessus
de lui qui n'y croit plus, la nuit est en mode "aurore boréale", je
compte, je sais qu'il ne se relèvera pas, je sombrerai aussi, engloutie par
tous les mots qui n'auront pas servi
qui n'auront pas sauvé
par les chiffres qui
ne compte plus que pour du sable
l'homme devient poème
figé, tétanisé par le gras de la nuit
et s'en est fini de
lui de nous
Des heures où l'on
mangeait des cerises à même les cerisiers, où l'on caressait des textures
douces, l'heure de l'homme devenu poème est un glas, une dernière aube, un
dernier souffle
7 / 8
de la nuit comme
renaissance avec la peur et l'ignorance, comme les nouveaux-nés avant le doigt
de l'ange
de la nuit comme point
de départ et d'arrivée
de la nuit jamais
comme présent, jamais comme cadeau, obscurcir sa lumière, se taire, on voit
rien
NYCpasTALOPE
9 / 10
l'enfant paraît
c'est GRAVE la nuit
jambes écartelées,
l'enfant se présente par le siège
On souffre, elle ne
peut plus respirer, le passage depuis la nuit aquatique est trop étroit
césarienne, alors,
ça déchire
je pense à des
crapauds
Je pense à des
crapauds et à des froufroutis, à des rampements sur les feuilles sèches
La nuit de suie
lorsque la lune est en panne
Comme un matin
fuligineux au pied d’un volcan en rut
Tourne et retourne
dans les draps
Rapprochements
frôlement de peaux de membres de froid d’odeurs de glacements.
8 nuits sans nuire
anesthésie
Des décors comme on en
trouve dans les cauchemars
Endormie devant la
télé les ailes du désir ne me font plus d’effet
Parfois on marchait
marcherait marchera
Dans la forêt main
dans la main
Dans les ruines
enfantômées
Le long du canal
Se souvenir de ces
nuits sans sommeil où l’on tourne les mots pour les ranger dans sa tête, de ces
nuits où l’on ne rêve que d’une chose : dormir !
Nuit grave
Dans la nuit inouïe,
mais pas désentendue, mettre bas en chantant
Quantique des
quantiques
Avant d’accoucher
moi-même, je croyais du verbe croire, 3ème groupe que les enfants ne naissaient
que la nuit
Je ne sais pas d’où me
venait cette croyance, que j’écrirais volontiers CROILLANCE
C-R-O-I-L-L-A-N-C-E, tant cette terminaison semble appuyer un ancrage profond
dans mon cerveau de papillon.
Pour moi c’était une
évidence
Pas sûre d’être née la
nuit, moi, même si longtemps ago dans mes fanfaronnades lyriques d’adolescente
précocement féministe, j’apostrophai ma mère en lui dédiant un poème qui
commençait ainsi :
« En pleine nuit tu
m’as donné le jour ! »
On était le 24
décembre, ça tombait bien on n’avait rien prévu pour le réveillon.
Négligeant ma feuille
de route, privilégiant la pleine lune, JE, ou bien était-ce ELLE, précipita la
fonte des neiges entre mes jambes. 2 heures du matin, la petite valise en
carton devant la porte, pleine de layettes amoureusement tricotées, je ne me
rappelle plus RIEN du trajet, tout à coup j’étais là à pleurer.
Lorsque je me
réveillai d’une nuit glauque, j’étais mère et perdue dans un monde de
science-fiction.
J’entendais sur fonds
de gargouillis de tuyaux des voix inhumaines parlant d’huîtres et d’escargots,
rien sur les feuilles, je ne l’avais pas vue arriver, imaginée plus que sentie
la lame du bistouri tranchant la peau de mon ventre, la double peine, la double
fente et pas d’enfant sur mon cœur.
La nuit avait duré
toute la journée, et les yeux encore myopes de mon bébé s’étaient ouverts dans
une chambre obscure, où le monde entier n’était que sténopé.
Je lis à présent que
les statistiques donnent raison à mon intuition .
Comme toujours l’explication
remonte "à la nuit des temps", pas la nuit des temps de Barjavel, pas la nuit
d’étang de Virginia, la nuit des temps de quand tout était bien ordonné, que
les prédateurs diurnes et repus prenaient un repos bien mérité protégeant femelles
et progéniture de leur appétit vorace.
Les anthropologues de
la nuit des temps, savent.
Ils savent tout des
cro-magnonnes mignonnes et des chouettes, des manchotes impératrices et des
population des pôles, qui elles...
Mais de la nuit des
temps à venir, rien. Obscure hantise.
Nous marchions dans la
forêt, là-haut, dans la parenthèse, accrochant plus fort nos mains à chaque
craquement de brindille.
Nous marchions sur la
route longeant l'Urubamba et le joueur de flûte n'avait pas de bonnet péruvien
mais des dreadlocks avant-mode
Nous marchions dans la
campagne encore endormie fiévreux d'une nuit blanche et tout était blanc, même
nous, qui en une nuit avions vieilli de mille ans d'un coup.
A chaque fois je -
nous, marchions vers notre destin quotidien.
Quelques lumières de
civilisation nous raccrochaient au monde dont nous nous étions extraits, mais
si loin, nous liant par un fil incassable à ce décor qu'il nous faudrait
réintégrer le jour venu, remettre nos masques diurnes témoignant alors du
chemin nuitamment parcouru. Indélébiles traces de ce chemin voulu, sous les
étoiles, à mille miles de toute raison raisonnable. Seul importait ce temps de
la nuit, la présence furtive des bêtes qui continuaient leur vie sans trop se
préoccuper de nous, et la nature bruissante, à l'affût, qui ne nous traitait en
intrus que dans la mesure où nous omettions ses codes les transformant alors en
embûches.
Je me disais alors
qu'il est bon de ne pas tout voir, de ne pas tout savoir. Je me disais qu'être
attentive à mes pieds, à la musique de la flûte, au dessin des constellations,
aux infinis mystères, aux cris des animaux, au chuchotement des brises, tout
cela suffisait amplement.
Et les étoiles de
briller davantage, à la proportion du nombre de regards tournés vers elles.
Some things are just pictures, they're scenes before your eyes. Don't look now, I'm right behind you.
(Laurie Anderson : The ugly with the jewells)
2 commentaires:
Quel superbe texte et quel souffle. Décidément, la nuit est la plus riche inspiratrice qui soit. Que de mots, dans ton texte parlant ou dérivant de la nuit! A lire et relire
Merci Ange-Gabrielle, c'est le texte que j'ai lu à La médiathèque de la Ric Vendredi. sur le thème de la nuit. C'était une magnifique soirée !
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